Depuis l’assaut armé contre le commissariat de Tanongou le 16 mai 2025, la panique s’est emparée de plusieurs localités de la commune de Tanguiéta. Hommes, femmes, enfants et bétails ont fui six villages sous la menace directe des groupes djihadistes. Le Bénin découvre une réalité inquiétante : celle de ses premiers déplacés internes liés au terrorisme.
Des villages vidés sous la menace
À Batia, Kayarika, Yangou, Sangou, Tanongou et Tchafarga, le silence est désormais maître des lieux. Les maisons sont vides, les greniers abandonnés, les pistes rurales désertées. Depuis l’attaque spectaculaire perpétrée contre le commissariat de Tanongou, le samedi 16 mai, les populations ont tout quitté dans la précipitation, redoutant une nouvelle offensive des djihadistes.
Armés jusqu’aux dents, les assaillants ont incendié les locaux de la police, blessé un agent, avant de se replier. Mais le pire est venu après : des menaces directes adressées aux habitants. « Ils ont promis de revenir. Nous avons compris le message », confie un jeune déplacé, les yeux perdus dans le vide, rencontré dans les rues de Tanguiéta-centre.
Un exode silencieux vers la précarité
Radio Fraternité FM Parakou a confirmé que des centaines de personnes ont fui, avec leurs maigres biens, vers Tanguiéta et les communes voisines comme Matéri, Cobly ou Toucountouna. Sans toit, sans nourriture, sans accompagnement, les déplacés s’entassent dans des conditions de grande précarité. Certains dorment à la belle étoile, d’autres dans des abris de fortune, accueillis par des familles solidaires mais déjà fragiles économiquement.
« Nos enfants ne vont plus à l’école. Mon fils doit passer ses examens bientôt, mais je ne sais pas où ni comment il pourra composer », témoigne le fils d’un chef de village, désormais installé à Toucountouna.
Un vide sécuritaire et institutionnel inquiétant
Après l’attaque, les forces de sécurité se sont retirées. Les policiers encore présents seraient en sous-effectif, incapables de rassurer ou de défendre les populations. « Même les derniers policiers sont partis. Et ceux que les terroristes ont enlevés, personne ne sait où ils sont », déplore un autre déplacé.
Face à cette menace persistante, les sinistrés lancent un appel désespéré aux autorités. « Si rien n’est fait rapidement, nos villages deviendront des camps djihadistes », prévient un vieil homme, abrité sous un bout de tôle.
Des poches de résistance… encore habitées
À Tchatingou et Tchawassaka, la vie subsiste, mais à moitié. Les écoles y sont fermées, les boutiques closes, les champs laissés à l’abandon. Partout, le silence pèse comme une menace. La peur est palpable, mais certains refusent encore de fuir, espérant une intervention.
Le Bénin face à une crise humanitaire naissante
Avec ces premiers mouvements massifs de déplacés internes liés au terrorisme, le Bénin entre dans une nouvelle phase de la crise sécuritaire sahélienne. L’urgence humanitaire et la réponse sécuritaire deviennent indissociables.
Face à cette situation, les attentes sont claires : protection, assistance, relogement, et surtout, une stratégie cohérente pour empêcher que les zones désertées ne deviennent des sanctuaires djihadistes.
✍️ Joseph MENSAH

